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Emmanuelle Blons et Anne-Sophie Chevasson : sens du travail, évolutions numériques et sociétales

Dernière mise à jour : 30 sept. 2019

Compte-rendu de la première conversation entre Anne-Sophie Chevasson (ingénieure chez Renault puis chargée de l'innovation managériale chez Poult, exerçant aujourd'hui des activités de conseil et formation aux entreprises / particuliers) et Emmanuelle Blons (Vice-Présidente associée d'Infosys, conseil aux entreprises sur la transformation digitale des entreprises)


Quel sens du travail au regard des évolutions numériques et sociétales ?


Évolution des temps (E. Blons) : auteure d'un ouvrage sur l'arrivée de l'intelligence artificielle et ses conséquences sur les manières de travailler. Les machines intelligentes vont nous dégager du temps : la question est donc "que voulons-nous en faire ?". Prônant une "ré-humanisation des temps", elle considère qu'il faudra consacrer davantage de notre temps de travail au lien social, à l'empathie, l'imagination, l'acte de création, au rôle de l'humain dans la prise de décision par rapport aux propositions que fera la machine.


Évolution des espaces (A-S Chevasson) : la localisation du travail change. Nos enfants ne comprendront pas pourquoi nous avons passé autant de notre temps dans les embouteillages ! Décaler les horaires, travailler plus près de son domicile, revivre dans des zones qui ne sont plus fréquentées... les potentiels sont infinis ! Chez Poult (usine de fabrication de biscuits), ils se sont posés la question de la localisation du travail, mais également les discriminations que cela risque d'entraîner. Il y a un lien entre le lieu et ce que je suis dans le travail : la localisation du travail pose des questions quasiment philosophiques ! Si Poult est allé très loin dans la démocratisation de l'entreprise (salariés associés dans la prise de décision, etc...), ils ne se sont pas engagés une démarche télétravail pour ne pas créer une inégalité entre les ouvriers "fixés" par la chaîne de production et ceux qui ne le seraient pas.


Des équipes mixtes hommes/machine (E. Blons) : ce couple n'est pas nouveau, mais l'IA franchit un cran supplémentaire car la machine est intelligente, elle apprend (comme un enfant de 3 ans, puis 10 ans, 20 ans... avant de maîtriser 20 langues !). Aujourd'hui, on ne sait pas travailler avec un robot intelligent, ni comment former une IA sans lui transmettre nos biais (souvent inconscients). Le savoir est aujourd'hui une commodité, que l'on peut trouver partout, tout comme l'expertise (transférée dans l'algorithme) : quelle est la valeur ajoutée de l'humain dans l'entreprise par rapport aux robots intelligents ?


À quoi sert le travail à la société / à l'entreprise (A-S Chevasson) ? On constate des questions d'épuisement, de stress au travail... car de le travail a été construit sur des bases de productivité, de valeur ajoutée, de résultat financier, ce qui peut être déshumanisant : au sein de certaines organisations, certains salariés n'arrivent plus à corréler leur propre travail par rapport aux missions de l'organisation dont ils sont membres. Quel est le sens à produire en tant qu'organisation, insérée dans une société ? C'est à cette échelle là qu'il faut se poser la question : développer individuellement / collectivement des potentiels (si ce qui est automatisable sera automatisé dans les prochaines années), ce que veux dire le travail (ce qui donne envie de venir le matin : autonomie, enjeux globaux et son rôle individuel, comment le tenir...). Le travail doit-il faire de l'argent ou de l'humain ?


Réfléchir au sujet, le prendre en main est un premier pas. Ce qu'il faudrait faire selon E. Blons et A-S Chevasson :

• s'acculturer et se former à ces sujets

• donner du sens au déploiement de l'IA : expliquer pourquoi on déploie, on forme de l'IA en tant qu'entreprise. Cédric Vilani évoque des "labs du travail" où chacun viendrait échanger et réfléchir sur les évolutions de son métier, avec d'autres salariés... mais cela pourrait se faire en entreprise avec les partenaires sociaux.

• apprendre à apprendre : les connaissances sont vite obsolètes, il faut se former en continu

• faire exister le futur du travail mais dans le présent : travailler à de nouveaux modèles d'organisation, de démocratisation de l'entreprise (nombreux ouvrages sur l'entreprise libérée, où les salariés ont voix au chapitre, y compris sur les sujets stratégiques). Réfléchir à son rôle sur son poste, mais aussi à l'organisation collective, ce qui permet aux salariés de s'approprier des sujets sur lesquels on ne leur avait jamais demandé leur avis, augmentant leur employabilité par la même organisation (= capacité à intervenir sur de multiples sujets).




Facilitation graphique réalisée par Nicolas Gros :


Cette séquence s'est conclue par une série de questions-réponses avec le public (pourquoi la conduite du changement ne décolle pas en France, comment parler autrement du salariat et pas uniquement dans le registre de la "soumission", ce que peux nous apprendre la sociologie des organisations...)


Enfin, les participants ont été interpellés sur leur "cri du coeur", ce qu'ils diraient à un jeune qui veut s'orienter ou s'insérer sur le marché du travail en 2030 : "apprenez à ne pas avoir peur du changement", "rapproches-toi de ceux qui ont de l'expérience, ils ont ouvert des voies, ils vont t'aider", "réussis tes études", "ne choisis pas de façon logique, car la logique elle va changer", "fais ce que tu veux, mais fais-le avec passion", "cherches ce qui correspond à ce que tu es", "ouvres-toi au monde", "n'ayez pas peur", "ne zappe pas, engage-toi et choisis"... pointant également le lien entre école (monde de l'éducation) et monde du travail, sujet au programme de la seconde conversation.

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